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Une histoire sans fin
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27 mai 2008

Où apparaît Arthur Cottard

Arthur Cottard, frère aîné de Théo, traverse pour ses dix huit une crise à la fois métaphysique et mystique car il est persuadé que toute âme digne d’elle-même souhaite vivre sa vie à l’extrême, que se contenter de ce que la vie vous donne — et dans son cas il doit s’avouer qu’il n’a pas été desservi par le sort — c’est se conduire en esclave. Que demander davantage c’est se conduire en enfant. Conquérir un peu plus, c’est être fou car toute conquête finit par s’engluer dans la vanité des choses de ce monde. Il sait, sent, qu’il est parvenu à un moment de sa vie où se proposent à lui des choix qui deviendront irréversibles car il n’a plus à sa disposition les excuses de l’ignorance enfantine ou de la maladresse adolescente. S’il veut être, s’il veut être quelque chose, c’est maintenant qu’il doit se décider.

Longtemps il a cherché dans les livres des esquisses de solution, des propositions susceptibles de l’éclairer; dans les héros de roman ou de films des modèles possibles, dans les péripéties des fictions des éventualités de moments de vie à construire, mais, constatant son insatisfaction vitale, sous la poussée des besoins de son corps, il lui a bien fallu accepter que lire n’était que se distraire de vivre (sans le savoir il reprend ainsi à son compte un passage du Livre de l’intranquillité de Fernando Pessoa qu’il a lu quelques années auparavant et qui l’a fortement marqué de son pessimisme à la fois radical et tranquille) et que s’il voulait vivre, vraiment vivre (il porte en lui une forte santé physique  qui agit en ce sens), il lui faudrait sortir de ses torpeurs quotidiennes pour tenter d’aller à l’extrême, vivre sa vie à ses limites. Substituer l’énergie à l’intelligence, rompre tous les liens entre volonté et émotion pour, d’une inconscience vierge, s’élancer sans crainte ni illusion dans les tempêtes océanes de l’être.

Il a beaucoup réfléchi à ce sujet car vivre à la limite — expression facile — n’est pas aisé à définir, il voudrait se livrer corps et âme à la vie, l’épuiser, sans être ni jaloux ni exigeant d’elle, posséder la vie à l’extrême, n’en rien laisser perdre d’anodin ni de routinier, faire de chaque acte une découverte absolue dans toutes les sensations vécues, toutes les formes d’énergie extériorisée, tout posséder sans l’épuiser et de toutes les manières. Il est devant la vie comme devant une porte qui s’ouvrirait sur un jardin magique plein de plaisirs inouïs mais qui pourrait également donner sur un désert aride de pierres et de sable. Il sait, devine, qu’il lui faut ouvrir cette porte quel qu’en soit le risque, s’élancer vers cet inconnu auquel il aspire (qu’il redoute aussi, mais c’est en partie cette crainte à laquelle il aspire).

Mais pour faire ce pas il est seul.

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