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Une histoire sans fin
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16 août 2008

Marc Hodges et son roman

L’intrigue est simple : une partie de la mafia chinoise du treizième arrondissement de Paris (Marc ne sait pas si elle existe mais ce n’est pas important, la plupart des romans sont des réalités impossibles) se bat contre une autre partie pour le contrôle des immigrés clandestins.Donc il y a des cadavres sinon pas de roman policier, pas d’intrigue, pas d’enquête. Une partie des cadavres appartient à un clan, m’autre à un autre. Tout ça peut-être dit en six lignes. Mais six lignes ne font pas un roman et de toutes façons Marc Hodges se moque pour l’essentiel de l’intrigue elle-même. La commissaire Albertine Schwilk se trouve, à cause du choix des combattants qui fait de Fontainebleau leur terrain de décharge (situation traditionnelle pour la pègre parisienne), devoir diriger l’enquête. Mais cette enquête la dépasse — Marc a décidé que sa commissaire n’était pas le héros habituel du roman policier mais un personnage plutôt falot empêtré dans des problèmes personnels et n’ayant d’autre vrai ambition que d’arriver sans heurt à la retraite (il faudra y consacrer quelques pages à travers des anecdotes, ne pas le dire, mais le faire comprendre) — pourtant, malgrè elle, elle trouvera la solution aux problèmes posés. Les cadavres sont nombreux, divers inattendus et il faut tous les relier à l’intrigue principale (on peut toujours trouver une solution, même une chute de cheval peut s’expliquer par une curiosité malsaine, les auteurs de roman n’ont pas une imagination débordante). Mais Hodges ne s’intéresse pas à l’intrigue, elle n’est qu’un prétexte pour essayer de ne pas perdre son lecteur, lui faire croire qu’il y a des mystères, des énigmes, des signes mystérieux (les hexagrammes par exemple dont il ne sait pas encore trop ce qu’il va faire). Ce qui l’intéresse, c’est de balader son lecteur d’une page à l’autre, aller de ci de là, décrire  un détail pour le plaisir de le décrire même s’il faut ensuite trouver quel rôle lui faire jouer dans la composition d’ensemble. Sa topologie préférée est le labyrinthe, que le lecteur se perde, lise, se perde, croit se retrouver, se perde, imagine une porte de sortie, tisse son fil d’Ariane en pensant que c’est l’auteur qui maîtrise une construction complexe, entraîne son lecteur dans un jeu intellectuel complexe (plus ou moins, il ne faut pas exagérer). Marc Hodges pose ses pages, une après l’autre, comme des briques. Il sait vaguement le mur qu’il veut construire, cherche à le faire tenir debout mais ignore s’il peut servir à quelque chose et surtout pourquoi il le construit. Ça l’amuse — pas toujours pourtant. Ça l’occupe, ça lui permet de gagner sa vie — ce qui n’est ni négligeable ni humiliant. Il écrit parce qu’il a toujours écrit, ne sait rien faire d’autre et même si parfois il s’amuse à dire « pour la postérité », en fait il s’en fout parce que, très matérialiste, ne compte pour lui que la vie qu’il est en train de vivre au jour le jour. Ce qu’il aimerait c’est être célèbre de son vivant pour profiter des avantages matériels qui vont avec. Il est un peu comme ce politique qui, tous les matins, en se rasant rêvait d’être Président de la République. Sauf que lui il ne sait pas d’une part comment s’en donner les moyens et d’autre part est trop hédoniste pour se contraindre à quoi que ce soit. Alors… Il rêve l’écriture comme une loterie.

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